Fantasia 2015 – Anima State

001Pour l’être montréalais que nous sommes, on se doit de critiquer le film pakistanais Anima State plus comme un objet de curiosité que comme un simple film car il y a trop de références historiques et culturelles qui nous échappent en ces 80 minutes où l’on découvre un Pakistan qui nous est insoupçonné. Mais, on se doit aussi de saluer le culot et l’audace de son réalisateur (Hammad Khan) qui souhaitait par cette œuvre mettre en pleine figure de ses compatriotes toute la laideur de la société pakistanaise moderne; il s’en prend aux médias, aux politiciens, quelque peu aux Talibans… et à tout le reste. (On voit même le personnage se masturber devant la victoire pakistanaise lors de la Coupe du monde de cricket, l’un des rares aspects que tous les pakistanais (peu importe leur âge, leur sexe ou leur classe) glorifient.)

Anima State est en quelque sorte un essai audiovisuel subversif sur le passé, le présent et le futur d’un pays en mal dans lequel on y retrouve un homme sans visage qui perpètre une série de meurtres impunis visant des gens de toutes les sphères de la société. En fait, il est recouvert de bandages pour, son propre dire, empêcher sa tête d’exploser. On ne sait pas qui il l’est, d’où il vient; mais c’est parfait, il pourrait être n’importe quel jeune pakistanais tant il agit par la colère de toute une génération de désœuvrés.

La violence en ce film est comme les sentiments de l’antihéros (dont on n’entend jamais le nom), détachée. Les spectateurs en sortent ainsi tachés de sang sans toutefois en être troublés.

Ce film underground ne suit pas une structure de scénario classique, il vire même en œuvre abstraite vers la fin. Malgré l’absence de réels repères cinématographiques et culturels, on passe un bon moment en l’écoutant. Cette thérapie-choc a un petit côté humoristique, presque bon enfant, punk même, qui fait tout son charme. Et malgré son fort côté pakistanais, l’œuvre à l’image de son réalisateur qui vit maintenant à Londres, demeure assez occidentale.

Enfin, à la toute fin, sans vraiment brûler de punch, le cinéaste est en quelque sorte démasqué, il devient un peu fou et il est pourchassé. Image de ce qui l’attend suite à la parution de ce film interdit au Pakistan? Pas nécessairement, mais cela amène une quelconque mise en abyme fort intéressante.

P.-S. On peut en découvrir un peu plus sur ce film et son réalisateur dans cette entrevue donnée l’an passé :

– ‘xim Sauriol

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