Une soirée festive tourne au cauchemar dans « Ludo » du duo de réalisateurs indiens Nikon et Q. Ria (Subholina Sen) et un groupe d’amis font le tour de la ville pour faire la fête. Loin des restrictions parentales, les jeunes adolescents vont danser, boivent de l’alcool et cherchent un endroit pour la nuit où ils pourraient assouvir leurs besoins charnels.
Leur quête les entrainera, après les heures d’ouverture, dans un méga centre d’achats complètement désert. L’emplacement leur semble idéal jusqu’à ce qu’ils fassent la rencontre de deux êtres désincarnés qui y déambulent seuls sans but apparent. Pris au piège avec ces personnages étranges, les adolescents n’ont pas d’autre choix qu’attendre le matin pour pouvoir sortir. Mais la soirée prend un tour pour l’étrange lorsqu’ils sont invités à jouer une partie de Ludo, un jeu de chances et de hasards qui semblent avoir un effet surnaturel sur leur environnement et sur leur état de conscience. Sans le savoir, Ria et ses amis sont désormais les souffre-douleurs du jeu diabolique.
La première partie de Ludo est hautement efficace. Ria et ses amis nous sont présentés comme une bande on ne peut plus typique assoiffée de libertés et d’excès. Des ados qui n’ont rien en commun avec les voyous et qui cherchent tout simplement à profiter des plaisirs associés avec la jeunesse. Des personnages sympathiques desquels émane beaucoup d’authenticité et de soif de vivre. C’est d’ailleurs ce sentiment de véracité qui permet de s’identifier aux jeunes, de les suivre dans leurs périples et de voir où celui-ci les entrainera.
Pour les Nord-Américains, le long métrage est aussi l’occasion de découvrir un paysage indien qu’il nous est rare de voir, celui de la jeunesse de ce pays. C’est d’ailleurs avec une certaine déception que le film emprunte la direction du paranormale et de l’épouvante. À partir de cet instant, tout ce que nous avons comme repère dans Ludo prend la fenêtre. Toute familiarité ou balise est remplacée par une danse macabre ponctuée d’une touche de psychédélisme. Bien que sa prémisse semble emprunter directement au « Slasher », typiquement américain, son traitement en est tout autrement.
Influencés par le mysticisme indien, nous sommes laissés avec un profond malêtre, condamné comme les protagonistes du film, dans une sorte d’enfer terrestre à mi-chemin entre le purgatoire et le domaine de Satan. C’est durant cette partie du récit que Ludo divisera le plus. Soit on embarque et on accepte de se laisser bercer par le caractère éclaté du film, soit on décroche. Il faut dire que les artisans de Ludo n’ont pas peur de stimuler nos sens à grands coups de lumières multicolores et de sons discordants.
Certains choix narratifs demeurent houleux en dernière partie et la fin abrupte nous donne le sentiment d’être restés un peu sur notre faim. Par contre, pour les amateurs d’horreur en quête d’une œuvre différente et qui n’ont pas peur de l’expérimental, Ludo est un ajout rafraichissant dans un genre qui est trop souvent handicapé par ses codes usés à la corde.
– Benoit Mercier