Kick-Ass, mais…

Voici un article qui provient de notre collègue Francis Ouellette, coanimateur du 7ème antiquaire sur les ondes numériques de CHOQ.FM

Ceci n’est pas une entrée de blogue sur l’éventuel film de Matthew Vaughn, Kick-ass, adapté de la bédé du même nom. J’ai eu un frisson ce matin en lisant cet article sur cyberpresse. Jean-Michel Berthiaume, mon pote de route au sein de ce blogue (Le 7ème antiquaire), participait jadis à l’émission de pop-culture les Mystérieux étonnants. Je me souviens vaguement d’une de leur émission où il parlait de la bédé mentionnée plus haut (où était-ce Wanted, je n’en suis pas sur. Je n’arrive pas à retrouver la dite émission dans les archives). Emporté par un vent hystérique de spéculation, quelque peu fébrile –je me souviens qu’il avait commencé son schtick par un « Bon là là…y s’passe quelque chose » haletant -, il avait suggéré que le comic Kick-ass, directement ou non, en corrélation avec la surexposition actuelle de l’archétype super héroïque dans le culture de masse, sonnerait le coup d’envoi mémique d’un phénomène viral, le super héros live. Des gens qui enfilent des collants et patrouillent les rues, cherchant à défendre la veuve et l’orphelin.

À peine deux ans plus tard, le phénomène se manifeste peu à peu. Du simple cosplay public, on retrouve maintenant des gens qui patrouillent les rues toute la nuit, qui ont des identités secrètes et des noms de code. Ce qui a commencé comme simple mode devient peu à peu un phénomène culturel hautement viral. C’était précisément le sujet (le dessein?) de Mark millar avec son Kick-ass.

Chaim Lazaro AKA Life

Ça ne s’arrête pas là. Fétichisme oblige, on trouve même un registraire des Super-héros véritable actuel (Tony Stark was right!), le World Superhero Registry. Ils ont aussi des pages Facebook et Myspace. On peu d’ailleurs voir certain d’entre eux dans le matériel supplémentaire du Director’s Cut de Watchmen. On peut être fier: le communauté super héroïque à même sont représentant canadien, Polar man (Alpha Flight au complet peut allez se rhabiller. They we’re wrong! ). Il vous protège ET tasse la neige. My kind of hero! Vous me direz que donner de l’attention à ces malades, positive ou négative, comme je suis d’ail leurs en train de le faire, ne fera qu’empirer cette psychose collective. J’imagine mon pote Jim arborer un sourire narquois en lisant ces lignes (The Jimster was right!).

Mais vous savez, ce phénomène, tous lecteurs de comic-book, moi y compris, l’attendent depuis un bout de temps. Dans le fond, on en crevait d’envie. Est-ce que c’est étrange, inquiétant, downright creepy? Tout à fait. Great isn’t it! Que le psychodrame commence. Excelsior!

Big man Japan

 

Le 7ème est un maniaque des kaiju eiga, les films de monstres géants japonais. Question de remettre les pendules à l’heure sur un genre trop souvent décrié par une certaine intelligentsia bourrée de préjugés qui n’en a probablement pas vu un seul, nous avions fait jadis une émission — que dis-je? — deux émissions sur le sujet; Ishiro Honda, le créateur du genre, et sa célèbre progéniture, Godzilla. Pour l’occasion, nous avons même chanté un blues d’Alan Moore sur le grand saurien, Tramplin’ Tokyo. A Capela. Oui madame. (vous pouvez les écouter les émissions en cliquant respectivement ici et ici).
Nous attendions évidemment Big Man Japan avec impatience. Son absence au festival Fantasia nous a semblé de mauvais augure. Puis, le film est sorti, dans une relative indifférence. Quelques critiques timides, d’autre hautaines. Et hop…un petit DVD discret débarque sur les étalages. L’engouement général pour l’ovni nippon, si engouement il y avait, s’est rapidement estompé.
C’est donc plus ou moins appréhensif que je regardai le film hier.
Flabbergasté. Rien de moins. Ce n’était assurément pas le film attendu.
Si Ozu avait fait son kaiju eiga, Big man Japan aurait été le résultat. Ce n’est rien de moins que le Tokyo Story des films de monstres géants. Mais non, je ne blague même pas. Pour la petite histoire: Masaru Dasaito est le dernier d’une longue lignée de défenseurs du Japon. Quand des monstres veulent détruire Tokyo, c’est lui qu’on appelle. On l’envoie dans une centrale énergétique expérimentale où on le gonfle et le transforme en géant. C’est un héros. Tout le monde s’en contrefout. C’est un fonctionnaire. C’est une blague. On le déteste, on le trouve plus nuisible que vraiment héroïque. Un genre de Hancock géant et obèse en caleçon.

Entre une beuverie de karaoké et une transmutation, des documentaristes suivent son quotidien banal, ses relations ruinées. Tout ça ponctué de combats avec des kaijus plus nuisibles que dangereux et particulièrement étranges (l’un d’entre eux est un gros pied surmonté de la tête du comédien Riki Takeuchi, un habitué de Takashi Miike).

Ce qui fait le charme de Big man Japan, c’est la mélancolie qui accompagne le propos déconstructiviste du récit. En 1977, Robert Mayer, un romancier inconnu, écrivait un chef d’oeuvre de pathos suivant un super héros bedonnant, banlieusard, à la retraite, intitulé Superfolks. Loin de se douter que tous les grands du comic suivraient cette approche, d’Alan Moore à Grant Morisson, Mayer fut un des premiers à effleurer le thème avec le brio nécessaire pour convier autour des ces archétypes des petites tragédies de l’ennui. The Incredibles, The Sentry, Dark Knight Returns… avant, il y a eu Superfolks. C’est précisément l’approche de Mayer qui est préconisée par Hitoshi Matsumoto, le réalisateur du film.

Il est tentant de comparer le film à Watchmen. L’approche est similaire. À l’idéalisme patriotique des années 60, on oppose l’indifférence cynique de notre époque. Au Japon comme partout ailleurs, le super héros n’inspire plus confiance. On ne le craint même pas. Les combats de Big man Japan bloquent les rues quelques minutes, coûtent des millions en dommages… et il doit faire des pieds et des mains pour que tout le monde puisse voir les publicités qui ornent son torse, question de payer pour tout ça. Son rituel de transformation sacré, jadis crucial, est désormais considéré long et fastidieux, vidé de son essence (l’allusion au Sumo est évidente).

C’est le crépuscule des idoles façon niponne, la déconstruction d’un genre, la perte des idéologies, des repères et des traditions. Les héros du passé, déphasés moralement, n’ont plus leur place dans un monde qui est, tout compte fait, assez indifférent à sa propre survie. C’est aussi probablement un e réflexion sur le cinéma japonais, qui doit se faire plus violent, plus bruyant chaque jour (symbolisé par les étranges kaijus) pour garder l’intérêt de son jeune public. Mais par dessus tout, c’est un film sur la perte de la mémoire, personnelle et collective.

-FRANCIS OUELLETTE

The Walking Dead

Voici une nouvelle qui provient de Francis Ouellette, coanimateur au 7ième Antiquaire sur CHOQ.FM

Tous les lecteurs de cette série de comics de Robert Kirkman, rien de moins qu’un des plus grands chefs d’oeuvre de ce sous-genre qu’est le film de morts-vivants, vous le diront : c’était inscrit dans le grand plan cosmique. Walking dead devait devenir une série télé. Bordel! C’est déjà une série télé.
Vous n’êtes pas familiers?

Le comic est écrit comme un hybride de LOST et de JERICHO (mais c’est meilleur que les deux, rien de moins); c’est un road movie, un survival nous dévoilant avec parcimonie les secrets les plus intimes de ses personnages, les modifiant graduellement sous nos yeux. Le contexte? Une apocalypse de zombies qui n’est à peu près pas élaborée. C’est de la très belle dramatisation, hautement prenante. C’est parfois même carrément éprouvant.

Mais contre toute attente, même si le show ne sera pas le fantasmé HBO voulu par les fans, c’est AMC qui a saisi les droits (on leur doit Breaking Bad et Madmen, des séries bien lourdes, et l’éventuelle nouvelle mouture de The Prisoner avec Ian McKellen et Jim Caviezel). Encore mieux, Frank Darabont est associé à la scénarisation. Quiconque ayant vu son The Mist en conviendra, le film possède précisément le ton qu’il faut aller chercher pour Walking dead, d’emblée qu’une partie de la série devra obligatoirement se passer dans une prison et que Darabont est un spécialiste du genre (Shawshank Redemption et Green Mile). Que ce soient des créatures Lovecraftiennes ou des morts-vivants est accessoire dans ce type de récit. Il est avant tout question de montrer les vicissitudes du comportement humain en temps de crise. Oh, et c’est produit par Gale « comic-book loving' » Anne Hurd.


– Françis Ouelette